POTS HORTICOLES La fin du tout-plastique s’organise
Pratiques, économiques, stables, faciles à transporter, les poteries en plastique ont participé au développement de la filière, mais elles sont aujourd’hui remises en cause. Comment changer les habitudes sans que la qualité des produits ou la rentabilité n’en pâtissent ? Ces questions ont fait l’objet de plusieurs échanges et tables rondes à l’automne 2024.
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Deux tables rondes à l’occasion du Salon du végétal, à Angers (49) en septembre 2024, ont réuni – à l’invitation de l’interprofession Valhor – des fabricants de solutions alternatives aux poteries plastique, des producteurs utilisateurs et paysagistes, des chargés d’expérimentations horticoles.
L’interprofession a choisi de se pencher sur la question de la bonne gestion du plastique dans la filière du végétal depuis plusieurs années. « Nous avons eu la volonté de faire une sorte “d’arrêt sur image” et de nous poser les questions de base : c’est quoi un pot plastique ? à quoi sert-il ? de quoi est-il constitué ? quelles sont les filières ? peut-il être recyclé ? collecté ? » explique Mikaël Mercier, qui pilote le groupe de travail au sein de Valhor.
3R : réduction, réutilisation, recyclage
Au-delà de la complexe question de la collecte et du recyclage des pots en plastique (dossier du Lien horticole n° 1146 de juin 2025), ce sont les solutions biosourcées zéro déchet et leurs usages qui étaient au centre de ces tables rondes.
C’est-à-dire commencer par s’interroger sur le remplacement du plastique avant d’envisager son recyclage. « Aujourd’hui, il faut réduire notre impact global sur l’environnement », affirme Julien Perrève-Genet, directeur de Fertil, qui propose le Fertilpot en fibres de bois. « Pour cela, nous pouvons nous baser sur la stratégie des 3 R : réduction, réutilisation, recyclage. Et l’ordre a son importance. Il faut donc aller vers des produits qui soient zéro déchet. Quand on n’a pas la solution, on réutilise, et uniquement in fine on recycle. »
Si la France est plutôt en avance sur ce problème par rapport à ses voisins, le prix reste un enjeu fort, ces solutions étant deux à trois fois plus chères que le plastique. « Il faut prendre en compte l’ensemble de l’équation, et alors le rapport change, tempère Julien Perrève- Genet. En incluant l’impact environnemental du pot plastique, son coût pour la planète n’est plus le même. »
Quid des pots biosourcés ?
Où en est-on actuellement en production ? « Pour l’instant, quand on parle de pots biosourcés, on est plutôt sur des petits contenants. Et, dans la pratique, plutôt comme supports de cultures intermédiaires, pour la multiplication », explique Maxime Dupont-Gendron, conseiller horticole à Planète Légumes, Fleurs et Plantes, à la station de Roville-aux-Chênes (88).
« Aujourd’hui, nous pouvons produire des plants en huit à dix semaines dans des pots biosourcés et ils seront toujours en bon état », affirme Héloïse Royer, ingénieure d’expérimentation à la station Astredhor Seine-Manche, à Saint-Germain-en-Laye (78). Mais cela implique, inévitablement, d’ajuster ses itinéraires de culture : arroser plus souvent, préférer le goutte-à-goutte à la subirrigation ou à l’aspersion, surveiller la fertilisation pour repérer une éventuelle faim d’azote.
Plus chers et nécessitant une adaptation technique, les pots biosourcés trouvent-ils leur place chez les producteurs ? Ils bénéficient d’améliorations continues afin qu’ils s’adaptent mieux aux contraintes de production. « Les dernières innovations les ont rendus en partie mécanisables, au moins pour le rempotage », juge Maxime Dupont-Gendron.
« D’un point de vue technique, il peut y avoir des avantages aux pots biosourcés auxquels on ne pense pas à première vue, argumente Héloïse Royer. L’adaptation des itinéraires techniques peut révéler des opportunités potentielles. Certains plants vont être moins poussants dans un pot biosourcé, avec finalement un effet nanifiant naturel, par exemple. »
Le fabricant Klassmann-Deilmann a mis sur le marché le Growcoon, un filet de culture pouvant être utilisé directement en plaque de culture. Lionel Debauge, directeur France, insiste sur l’intérêt agronomique de ces solutions biosourcées, notamment au niveau du développement racinaire, avec une reprise optimale.
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« Ce qui est difficile à trouver, détaille Damien Vivier, pépiniériste qui utilise les pots en fibres de bois Fertil après d’autres essais plus ou moins fructueux, c’est l’équilibre entre stabilité en culture et dégradation après la plantation. »
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Le paysage, un des principaux marchés
Se pose aussi la question des débouchés de ces produits. Tous les intervenants s’accordent sur le fait que la distribution spécialisée et la grande distribution ne seront probablement pas précurseurs. L’effort de communication nécessaire auprès des consommateurs est en effet énorme (à ce sujet, lire l’article « Proposer des produits écoresponsables, une démarche à promouvoir ! » dans Le Lien horticole n° 1135, page 42).
A contrario, les producteurs détaillants ont sûrement une carte à jouer. « En contact direct avec les consommateurs, ils sont déjà en avance sur le réemploi des pots », explique Mikaël Mercier.
Hervé Simier, horticulteur qui utilise les filets Growcoon (lire Le Lien horticole n° 1142, page 26), confirme : « Dans notre point de vente aux particuliers, c’est un produit qui marche. Tout est question d’explication, d’éducation. » Sa clientèle de collectivités saute également le pas. « Nous ne leur avons pas laissé le choix », admet-il.
Car le principal marché identifié par les intervenants est en effet celui du paysage. Au cours d’un chantier de plantation, les pots biosourcés offrent un double gain : réduction du temps de main-d’œuvre puisqu’il n’y a plus de dépotage nécessaire et, après le chantier, aucun déchet à gérer.
De quoi entrevoir un partage du surcoût entre producteurs et clients ? Renaud Vital-Durand, acheteur chez Terideal, se veut optimiste : « Si nous sensibilisons l’ensemble des parties prenantes, tout le monde s’y retrouve : les conducteurs de travaux, les bureaux d’études, les clients. Un pot biosourcé, c’est un tiers de main-d’œuvre en moins sur un chantier. Donc oui, il y a un surcoût à l’achat, mais cela devrait rester gérable. »
Quid des couleurs ?
À l’heure actuelle, sans passer encore aux pots biosourcés, beaucoup de producteurs ont remplacé leurs pots avec du noir de carbone par des poteries plastique colorées, recyclables. À l’occasion des journées « Bonnes Pratiques », organisées en septembre 2024 par MPS France et Excellence végétale, Laurent Mary, du Caté, station d’expérimentation à Saint-Pol-de-Léon (29), a présenté les travaux en cours au sein de la station bretonne à ce sujet.
Le Caté étudie l’impact de ces différentes couleurs de pots sur la croissance et le comportement d’une culture d’arbustes. Le choix d’une teinte claire entraînera généralement un réchauffement moins rapide, et donc un démarrage des plantes plus lent en début de culture. Au contraire, un pot foncé (comme le noir) se réchauffe rapidement. Le choix d’une couleur de pot plastique nécessite donc, comme pour les pots biosourcés, d’adapter en parallèle la fertilisation, pour une bonne libération des engrais.
Si le pot n’est donc « que » le support de la culture, il n’en a pas moins un impact non négligeable sur les plantes, leur croissance, leur transport et leur commercialisation, justifiant que toute la filière – fabricants, producteurs, distribution et paysage – puisse s’emparer de ces questions… et de leurs coûts.
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